L’EXPERTISE MÉDICALE JUDICIAIRE

L'expertise médicale judiciaireIl s’agit, ici, d’envisager une instance civile ou une instance pénale dans le cadre de laquelle la juridiction pénale ne statue que sur les intérêts civils. Il existe, en effet, un régime spécifique venant encadrer l’expertise médicale lorsque cette dernière intervient dans le cadre du procès pénal, « proprement dit ».

Les instances dans lesquelles une expertise médicale peut être ordonnée sont diverses. Il peut s’agir :

  • D’une procédure visant à mettre en cause la responsabilité d’un médecin,
  • D’une procédure relative à l’évaluation d’un préjudice corporel occasionné par un accident (contentieux avec les compagnies d’assurances…),
  • Une action cherchant à déterminer les causes d’un décès,
  • Une action concernant l’état mental ou physique d’un individu (le contentieux des incapacités …).

En matière civile, l’expertise médicale est, comme toute expertise judiciaire, ordonnée par le juge. A ce titre, elle relève du régime général de l’expertise prévu par le Code de procédure civile.

La personne est au centre de l’expertise. De ce fait, sa dignité doit être préservée et un certain nombre de règles doit être respecté par le médecin expert.

Le médecin-expert

Le médecin-expert a cette particularité qu’il n’a pas vocation à procéder à des soins. Il n’est plus au service de la santé du patient (qui n’est plus un malade à soigner) mais au service de la justice.

Cela se traduit par l’apparition d’une relation expert-justiciable qui vient en lieu et place de la traditionnelle relation médecin/patient.

C’est pourquoi le médecin expert doit, dès le premier instant de l’entrevue, expliquer au justiciable qu’il reçoit, dans le cadre d’une expertise, la nature de sa mission ainsi que ses conséquences.

Quelles sont les incompatibilités s’opposant à la poursuite de l’expertise ?

Certaines incompatibilités sont prévues afin de garantir l’impartialité du médecin expert. Elles sont prévues par les dispositions de l’article R. 4127-105 du Code de la santé publique :

– Le médecin traitant est exclu des médecins pouvant être désignés expert en raison des rapports qu’il a entretenus avec son patient,

– Il est interdit à tout médecin d’accepter une mission d’expertise dans une procédure où sont en jeu :

  • Ses propres intérêts,
  • Les intérêts d’un parent, d’un proche ou de l’un de ses amis,
  • Les intérêts d’un groupement qui fait habituellement appel à ses services.

Quelle est la mission de l’expert ?

Quelle est la mission de l’expert ?

Mission de l’expert médicalL’expert est nommé par les tribunaux car il détient une connaissance de la matière médicale que ne détient pas le juge. Cette connaissance doit lui permettre de fournir l’éclairage nécessaire au juge pour trancher le litige et rendre une décision.

L’expert se voit confier une mission et se doit de répondre aux questions techniques qui lui sont soumises.

Le médecin doit se récuser dans le cas où la matière du litige n’est pas de sa compétence (Article R. 4127-106 du Code de la santé publique). L’expert étant nommé pour sa compétence, dès lors que cette dernière est prise à défaut, il est logique qu’il se retire.

Le médecin expert a l’obligation, comme tout expert, de remplir personnellement sa mission. Cette obligation prévue par le Code de procédure civile (Article 233) est renforcée dans le cas du médecin puisque ce dernier doit attester qu’il a respecté cette obligation (Article R. 4127-108 al.2 du Code de la santé publique).

Cette obligation s’entend au sens strict. Ainsi, ce n’est pas le service hospitalier auquel il est rattaché ou qu’il dirige qui est désigné.

En revanche, une assistance est possible, dans le cadre d’une spécialité qui n’est pas la sienne.

Comment se déroule l’expertise médicale ?

Au même titre que toute expertise, la convocation des parties à la première réunion d’expertise doit se faire par lettre recommandée avec accusé de réception.

Dans le cas où la mesure d’expertise ne nécessite pas leur présence (sauf audition ou examen médical), les parties peuvent être représentées par un avocat.

Dans tous les cas, les parties peuvent être assistées par un avocat ou par un médecin.

Un entretien précède l’examen éventuel ce qui permet à l’expert de glaner des informations complémentaires.

Il est impératif que le médecin dispose d’un lieu lui permettant de procéder à l’expertise dans de bonnes conditions, tant techniques que relatives à la dignité, à la sécurité et à l’intimité de l’individu examiné.

L’examen médical relève de la stricte intimité ; seuls peuvent être présents le médecin expert et le sujet de l’expertise.

En revanche, toutes les parties doivent être présentes en cas de dialogue post examen (notamment le médecin conseil). Durant cet échange, le médecin communique le résultat de l’examen.

Le médecin ne peut pas, à cette étape, donner son avis.

L’avis ne sera développé que dans son rapport d’expertise médicale rédigé postérieurement.

Le rapport d’expertise médical

Le rapport d’expertise médicalA l’issue de son travail, le médecin expert procède à la rédaction d’un rapport d’expertise destiné à éclairer la juridiction dans la recherche de la solution du litige. Il y délivre un avis professionnel.

Dans ce document, il y formule une réponse à toutes les questions posées par la juridiction.

Cette obligation est prévue par l’article 238 du Code de procédure civile. Il doit également apporter des réponses aux questions des parties et joindre à son rapport les observations faites par celles-ci.

Aucun formalisme n’est imposé à l’expert. Toutefois, il est courant que le rapport se décompose ainsi :

  • Un préambule contenant les informations relatives à l’expert, aux parties, à la juridiction et détaillant la mission confiée,
  • L’exposé des faits : notamment les différentes déclarations recueillies,
  • La description des examens cliniques (nature…),
  • Une partie discussion qui est le cœur de son avis, et par laquelle il procède à une démonstration fondant son opinion,
  • Les conclusions ; il s’agit des réponses aux questions de la juridiction.

Le secret médical à l’épreuve du principe du contradictoire

Deux principes vont devoir venir cohabiter lors de l’expertise-médicale : Le secret médical et le principe du contradictoire.

Le secret médical est défini par le Code de la santé publique aux articles L.1110-4 et R. 4127-4. Il s’agit d’empêcher le médecin de divulguer les informations dont il a eu connaissance dans l’exercice de sa fonction.

Cela permet de créer un véritable lien de confiance entre le médecin et son patient.

La violation d’une telle interdiction est sanctionnée pénalement.

Il est évident qu’un tel principe vient heurter de front la mission même du médecin expert qui est de rendre compte de ses constatations à la juridiction. Le principe du contradictoire étant un principe fondamental du procès civil, l’expert va donc être contraint de transmettre toutes ses constatations au Juge ainsi…qu’à l’ensemble des parties.

Pour concilier les deux, il a été établi que le secret médical était opposable au médecin expert, mais qu’en revanche, si le patient remet des pièces médicales à l’expert, il le délivre de ce secret.

Toutefois, le patient peut s’opposer à se soumettre à une mission de l’expert qui vient violer le secret médical. Il appartiendra alors au juge de déterminer si le refus du patient est légitime ou non. Dans ce dernier cas, il pourra en tirer des conclusions défavorables au patient.

Le médecin expert n’est, quant à lui, pas soumis au secret médical, dans le cadre de ses opérations d’expertise, envers le juge et les parties. Il doit communiquer aux parties l’ensemble des éléments qui lui sont remis, ses constations, ainsi que son rapport.

Cette dispense du secret professionnel n’est pas absolue. Le médecin expert doit, et ne peut, que révéler des informations relatives à sa mission. Il a pu, en effet, découvrir lors de l’exercice de sa mission confiée par le juge, d’autres informations, il doit alors les taire.

De même, il ne peut communiquer ces informations qu’aux seules parties et au juge, aucun tiers ne doit en avoir connaissance.

Quelle forme prend le rapport d’expertise médicale ?

A la fin de ses opérations, l’expert rédige un rapport destiné à répondre aux questions qui lui ont été posées.

A cette fin, il doit répondre à toutes les observations faites par les parties et annexer à ses conclusions tous les courriers reçus.

Aucune forme n’est imposée à l’expert. Toutefois, généralement, les rapports d’expertise médicale comprennent :

  • un préambule qui permet notamment de préciser l’identité des parties, la date et le lieu des opérations d’expertise.
  • L’exposé des faits : les déclarations de la personne expertisée y seront mentionnées. Les pièces dont l’expert s’est servi devront être décrites.
  • Les données de l’examen clinique : C’est ici que l’expert rend compte de ses examens.
  • Discussion : C’est ici que l’expert va s’expliquer sur sa position et doit éclairer la juridiction qui l’a désigné. L’expert, ici, commentera l’état de santé de la personne expertisée et évaluera son préjudice.
  • Conclusion : L’expert répond de façon succincte à toutes les questions posées par sa mission.
  • Annexes : il s’agit des observations écrites des parties. Elles doivent avoir été communiquées dans les délais impartis par l’expert.

L’expertise médicale est incontournable pour constater votre préjudice et évaluer sa réparation.

L’expert que vous aurez désigné et l’avocat qui vous assistera sont là, à vos côtés, pour apporter la juste contradiction à l’organisme payeur.