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La résidence alternée en 7 questions / Réponses.

Connaissez-vous vos droits et vos devoirs ?

Bien comprendre la résidence alternée des enfants pour la demander et l’obtenir, et … pour ne pas la perdre.

Il s’agira de traiter, ici, de l’alternance des domiciles après la séparation des parents et de la fixation par le juge de la résidence alternée.

1. Qu’est-ce que la résidence alternée ?

C’est la possibilité pour les parents séparés de fixer la résidence de leur enfant, en alternance, au domicilie de l’un et l’autre.

Improprement qualifiée de « garde alternée », l’alternance peut être, en temps, égalitaire ou inégalitaire.

C’est l’article 373-2-9 alinéa 1er du code civil qui l’envisage et qui dispose que « la résidence de l’enfant peut être fixée en alternance au domicile de chacun des parents ou au domicile de l’un d’entre eux »

Il n’y a pas lieu de retenir une priorité pour ce mode de résidence, quand bien même son positionnement dans l’article pourrait le laisser croire.

L’article 373-2-6 alinéa 1er du même code nous le rappelle : «  le juge du Tribunal judiciaire délégué aux affaires familiales règle les questions qui lui sont soumises dans le cadre du présent chapitre en veillant spécialement à la sauvegarde des intérêts des enfants mineurs. »

A cette fin, l’article 373-2-9 alinéa 2 prévoit que le juge a même la possibilité, à titre provisoire, d’ordonner une résidence en alternance dont il fixe la durée. Au terme de celle-ci, il statue alors définitivement sur la résidence.

Ne sont concernés que les enfants mineurs.

Elle est conforme à la Convention internationale des droits de l’enfant, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 20 novembre en 1989.

Ladite convention impose, en son article 9, de faire respecter le droit de l’enfant, dont les parents sont séparés, d’entretenir régulièrement des relations personnelles et des contacts directs avec eux, sauf si cela est contraire à son intérêt supérieur.

2. La résidence des enfants en France et en Europe

Pendant de nombreuses années ce mode de résidence n’a pas été reconnu.

La Cour de cassation avait condamné la garde alternée dans un arrêt du 2 mai 1984. (Cass Civ 1ere, 2 mai 1984)

L’opinion des professionnels de la santé et de l’enfance n’était pas unanime et des pédopsychiatres et psychanalystes comme Maurice BERGER y étaient opposés en raison du prétendu besoin de l’enfant d’une « asymétrie de la différence sexuelle ».

La doctrine était aussi diverse qu’opposée.

(Caroline SIFFREIN-BLANC)

Certaines juridictions passaient outre cette interdiction en accordant un droit de visite et d’hébergement tellement élargi, qu’il permettait en fait, malgré la fixation d’une résidence habituelle, une véritable résidence fixée en alternance.

C’est la Loi du 4 mars 2022 n°2002-305 relative à l’autorité parentale qui va consacrer la règle.  

En janvier 2015, 17 à 21% des décisions rendues fixaient la résidence des enfants en alternance égalitaire.

Il est de 30 % à la suite des séparations amiables selon certaines études. Il est même plus important, si on prend en considération les accords qui n’ont pas été soumis à la justice, les parents considérant que la présentation de leur accord en justice est superfétatoire.

C’est en l’état de ces chiffres faibles pour son adoption, qu’elle soit égalitaire ou inégalitaire en temps, que certains préconisent la modification de l’article 373-2-9 pour faire en sorte que les pères demandent plus souvent la résidence alternée et que la fixation de la résidence chez la mère dans près de 69% des cas laisse plus souvent la place à une alternance.

L’article 374 du code civil belge, et plus exactement son paragraphe 2 est l’illustration de ce que revendique les associations de pères en France telles que SOS PAPA.

Cet article instaure une présomption favorable à l’hébergement égalitaire et impose au Tribunal de motiver spécialement sa décision dés lors qu’il examine la demande d’un régime égalitaire.

Il ne peut donc rejeter la demande qu’après avoir examiné in concreto la situation, l’intérêt de l’enfant et …celui des parents.

L’article 374 est ainsi rédigé :

« Lorsque les parents ne vivent pas ensemble et qu’ils saisissent le tribunal de la famille de leur litige, l’accord relatif à l’hébergement des enfants est homologué par le tribunal sauf s’il est manifestement contraire à l’intérêt de l’enfant.

À défaut d’accord, en cas d’autorité parentale conjointe, le tribunal examine prioritairement, à la demande d’un des parents au moins, la possibilité de fixer l’hébergement de l’enfant de manière égalitaire entre ses parents. Toutefois, si le tribunal estime que l’hébergement égalitaire n’est pas la formule la plus appropriée, il peut décider de fixer un hébergement non égalitaire. Le tribunal statue, en tout état de cause, par un jugement spécialement motivé, en tenant compte des circonstances concrètes de la cause et de l’intérêt des enfants et des parents. »

La Loi belge, par cette présomption, contraint le parent qui s’oppose à l’hébergement égalitaire de démontrer qu’il est contraire à l’intérêt de l’enfant.

Les études en Belgique attestent d’une augmentation flagrante, celle-ci étant fixée aujourd’hui dans plus de 40%.

Toutefois, cela n’a pas été sans compter, l’intervention des juges désireux de tenir compte de l’intérêt de l’enfant avant ceux des parents.

La problématique liée à l’âge reste entière ; ce qui a permis à la plus haute juridiction belge de rappeler que la résidence alternée égalitaire n’est pas un droit pour les parents.

L’intérêt de ces derniers ne rejoint pas toujours celui de leur progéniture…

Pour de plus amples commentaires :  AJ Famille 2018 page 283

Hébergement égalitaire, mise en pratique en Belgique depuis plus de 10 ans – Bénédicte JACOBS.

Très récemment, pour la France, une proposition de loi a été enregistrée le 12 octobre 2021 à la présidence de l’Assemblée nationale pour modifier l’article 373-2-9 en ces termes : « À défaut d’accord entre les parents sur le mode de résidence de l’enfant, le juge fixe prioritairement l’hébergement en résidence alternée de l’enfant, de manière équilibrée entre ces deux parents, dans l’intérêt supérieur de celui-ci en application de l’article 371-1 »

Par cette modification, et puisqu’il y va de l’intérêt supérieur de l’enfant, il pourrait appartenir au parent qui s’y oppose de rapporter la preuve que ce mode de résidence, en l’espèce, n’est pas conforme audit intérêt supérieur.

La décision devrait évidemment, en cas de refus, être motivée.

3. La résidence alternée des enfants décidée amiablement par les parents après leur séparation ou leur divorce

Nombreux sont ceux qui, après leur séparation ou leur divorce, décident d’une « garde alternée » sans pour autant soumettre leur décision à la justice.

Il est néanmoins préférable de donner un fondement juridique à leur décision afin d’éviter tout différend.

L’article 373-2-9 renvoie à l’article 373-2-7 précisément afin de faire homologuer par le juge une convention par laquelle les parents ont organisé les modalités d’exercice de l’autorité parentale, et par là-même,  l’ont adopté.

L’accord n’exclut d’ailleurs pas le contrôle du juge qui veille et vérifie si ledit accord est conforme à l’intérêt de l’enfant.

Exemple : La résidence alternée par année entière a été refusée. (Cour d’Appel de DOUAI du 23 octobre 2003)

Elle a été également refusée au motif que l’enfant était épanoui en vivant chez son père et que la distance séparant les 2 domiciles ne pourrait que bouleverser son rythme de vie et favoriser sa fatigue du fait des nombreux déplacements. (Cour d’Appel d’AIX-EN-PROVENCE 1er juin 2007)

Il faut aussi noter qu’elle ne constitue pas une concession faite par un parent.

L’alternance est décidée dans l’intérêt de l’enfant, et elle ne peut être remise en cause, qu’en cas de changement de circonstances portant atteinte audit intérêt.

4. La résidence alternée fixée en justice dans l’intérêt de l’enfant

L’intérêt supérieur de l’enfant tel que mentionné par à la Convention internationale des droits de l’enfant, adopté par l’Assemblée générale des Nations unies le 20 novembre en 1989 est au centre des décisions prises par le juge aux affaires familiales dans la cadre des modalités d’exercice de l’autorité parentale.

L’intérêt de l’enfant, c’est l’unique principe retenu par le juge aux affaires familiales au-delà de l’intérêt du père, de celui de la mère, ou des parents.

La Cour de cassation et les Cours d’appel le rappellent systématiquement :

« Hors de toutes discriminations entre les parents,  […] l’intérêt primordial des enfants, qui ne pouvait être réduit à une stricte égalité de la durée du temps passé avec leurs parents, commandait de les maintenir dans leur environnement et une organisation de vie plus sécurisante. » (Cass civil 1re,  24 juin 2015)

«Cette situation n’apparaît pas conforme à l’intérêt des enfants qui doivent profiter pleinement de la disponibilité de leur père […] ; l’instauration d’une alternance égalitaire est d’une nature à satisfaire les intérêts les enfants tout en respectant les droits de chaque parent » (Cour d’appel de VERSAILLES 2e Ch. 1ere section 12 février 2015)

« La résidence alternée n’est pas un droit, et elle ne peut être ordonnée que si l’intérêt de l’enfant le commande » (Cour d’appel de BESANCON 2e Ch civ 19 juin 2015)

Pour l’apprécier et fixer la résidence alternée le juge peut user, en premier de l’article 373-2-11 du code civil, et prendre en considération les élément énumérés par ledit article, à savoir :

1° La pratique que les parents avaient précédemment suivie ou les accords qu’ils avaient pu antérieurement conclure ;

C’est la stabilité qui est ici favorisée.

2° Les sentiments exprimés par l’enfant mineur dans les conditions prévues à l’article 388-1 ;

3° L’aptitude de chacun des parents à assumer ses devoirs et respecter les droits de l’autre ;

4° Le résultat des expertises éventuellement effectuées, tenant compte notamment de l’âge de l’enfant ;

5° Les renseignements qui ont été recueillis dans les éventuelles enquêtes et contre-enquêtes sociales prévues à l’article 373-2-12 ;

6° Les pressions ou violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l’un des parents sur la personne de l’autre.

Au-delà des éléments énumérés à l’article 373-2-11, le juge prend en compte un certain nombre d’éléments.

Quels sont ces éléments jurisprudentiels ?

1° La proximité des domiciles ou du lieu de scolarisation

Il s’agit d’un élément de bon sens destiné à ne pas perturber l’environnement de l’enfant, et notamment sa scolarité.

Le juge acceptera ainsi les courts déplacements et elle peut être refusée en cas de trajet trop long.

On voit là toute l’importance de verser aux débats tous documents établissant le temps de trajet et la distance entre ces lieux. (Plan mappy, Google et autres)

2° Les conditions d’accueil

Le juge appréciera la capacité d’hébergement de l’enfant.

À cette fin il conviendra de verser aux débats tous éléments sur le nombre de pièces du domicile, et bien évidemment sur l’espace qui lui sera réservé.

3° La disponibilité et l’implication des parents

Il faut encore une fois verser au débat toutes les pièces qui attestent de la disponibilité et de l’implication souvent liées à l’emploi

Ainsi, il ne sera pas inutile de communiquer au tribunal les horaires de l’entreprise et les attestations ne laissant pas de doute sur l’implication du père et de la mère malgré leur emploi.

« La grande disponibilité [du père], qui ne travaille qu’une semaine sur 2, du mercredi au mardi suivant, depuis décembre 2010 (date à laquelle il a pris sa retraite) […] ; qui s’est parfaitement adapté au rythme de vie de ses enfants, en ayant mené un projet mûri et construit depuis plusieurs années, est bien-fondé et obtenir la mise en place d’une résidence alternée à l’égard des enfants » (PARIS, pôle ch 2, 23 juin 2016)

4° L’entente entre les parents

Avec toutefois une nuance : La mésentente n’est plus un obstacle à la résidence alternée, quand bien même, il ne la favorise guère.

Il faut dire que ce critère a souvent été instrumentalisé par le parent qui refusait l’alternance.

Une limite : L’article 373-2-11 permet au juge d’exclure ce mode de résidence en cas « de pressions ou violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l’un des parents sur la personne de l’autre »

C’est ce qu’a décidé la Cour d’appel de LYON dans un arrêt du 9 janvier 2012 : « Les relations extrêmement dégradées qu’entretiennent les parents dans le contexte de violence […] ne sont nullement propices à l’établissement d’une résidence alternée quand bien même les parents sont domiciliés dans la même commune. »

A noter aussi que l’instrumentalisation de la mésentente peut être contre- productif pour le parent qui en est l’auteur.

Ainsi, il a été jugé que le parent qui ferait obstacle à la mise en œuvre de la résidence alternée (par exemple en déménageant loin du domicile de l’autre parent) pourrait en être privé et voir la résidence fixée de façon habituelle chez l’autre parent.

5° L’âge de l’enfant

La loi ne fixe pas de limite d’âge.

Nombreuses sont les décisions qui refusent la résidence alternée sur ce critère.

La vision est culturelle, sociologique et philosophique pour considérer que la mère est « la figure d’attachement principale ».

C’est pourquoi, elle est souvent refusée avant les 5 ans de l’enfant.

Ainsi, en 2015 moins de 5% des enfants de cet âge était concerné par ce mode de résidence.

En tout état de cause, c’est l’intérêt de l’enfant qui sera toujours recherché.

6° L’avis de l’enfant

Ses sentiments sont pris en compte.

Les dispositions de l’article 388-1 du code civil s’impose au juge qui doit l’entendre si celui-ci en fait la demande.

Il faut toutefois que le mineur soit capable de discernement.

L’avis de l’intéressé sera un élément important pour le tribunal dans sa prise de décision.

Il s’agit aussi d’un élément délicat à prendre en considération car l’enfant peut être exposé à un conflit de loyauté lorsqu’il n’est pas sous emprise ; emprise pouvant nuire à son consentement.

En tout état de cause, il n’a pas l’obligation d’entériner la position de l’enfant ni même de préciser dans son jugement la teneur des sentiments exprimés par celui-ci.

S’il n’a pu se déterminer en l’état des critères décrits, il pourra au-delà de l’audition ordonner une enquête sociale, un examen médico-psychologique ou une mesure de médiation.

5. La pension alimentaire et l’alternance des domiciles

La situation ne devrait pas poser de problème dès lors que les parents ont des revenus équivalents.

Le problème se posera s’ils ont des revenus différents et dans ce cas, un parent pourra être amené à servir une pension alimentaire à l’autre.

Le principe n’est pas intangible et des décisions ont parfois institué une dispense de contribution alors même que les parents avaient des revenus différents.

C’est l’écart de revenus mais aussi leur montant (notamment si les revenus sont élevés) qui pourront entrainer une dispense de contribution.

Généralement néanmoins en cas de revenus différents, le juge mettra à la charge du parent le mieux pourvu une contribution, et ce, afin de garantir à l’enfant des conditions de vie équivalentes  chez chacun de ses parents.

(Cour d’appel de LIMOGES 3 novembre 2014, Cour d’appel de PARIS 4 juin 2015, Cour d’appel de PAU 14 septembre 2015, Cour d’Apple de RENNES 22 mars 2016)

6. Les allocations familiales en cas de résidence alternée

L’article 196 du code général des impôts pose le principe : En cas de résidence alternée, la majoration du quotient familial est partagée, sauf accord différend entre les parents.

7. La fiscalité de la résidence alternée

Lorsque l’alternance a été décidée l’allocation de la CAF est partagée sauf autre accord ; et ce, quand bien même l’enfant serait majeur.

La consultation d’un avocat peut être utile pour faire faire valoir vos droits dans le cadre de la fixation d’une résidence alternée, et dans l’intérêt de l’enfant.

Il peut également être utile de consulter un avocat pour ne pas voir cette résidence modifiée.

Le cabinet de Maître Emmanuel PARDO est à votre disposition dans le cadre de toutes procédures judiciaires destinées à faire respecter vos droits.

AVERTISSEMENT : Cet article a pour unique objet d’intéresser l’internaute sur une question juridique. Il n’a aucun caractère exhaustif et sa lecture ne saurait se substituer à l’indispensable consultation d’un professionnel du droit, tel qu’un avocat, à même d’appréhender les spécificités d’une situation factuelle.

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