Le droit de visite et d’hébergement en 7 questions / Réponses.
Connaissez-vous vos droits et vos devoirs ?
Il s’agira de traiter, ici, du droit de visite et d’hébergement après la séparation des parents (divorce par exemple) et de sa fixation par le juge aux affaires familiales (JAF), pour bien comprendre ce droit afin de le demander et l’obtenir, et … pour ne pas le perdre.
Qu’est-ce que le droit de visite et d’hébergement ?
Le droit de visite est le droit de rencontrer votre enfant qui ne réside pas en votre domicile.
Cette rencontre peut se faire au domicile de l’autre parent chez lequel il réside mais aussi dans un lieu neutre déterminé ;
Il peut alors s’agir par exemple d’un jardin public ou d’un espace dédié à ce genre de rencontre que l’on appelle alors « lieu médiatisé ».
Le droit d’hébergement est le droit de l’accueillir, que ce soit le jour ou la nuit, en votre domicile, pendant une période déterminée.
Comment s’exerce le droit de visite et d’hébergement ?
En vertu de l’article 373-2-9 du code civil, dès lors que la résidence alternée des enfants n’est pas possible ou n’a pas été souhaitée par les parents, ces derniers ou le JAF peuvent décider que les enfants résideront de façon habituelle chez leur père ou chez leur mère ; l’autre parent étant alors bénéficiaire d’un droit de visite et d’hébergement.
C’est l’intérêt de l’enfant qui doit guider le choix des parents ou la décision du juge aux affaires familiales.

Plusieurs critères sont alors pris en considération tels que la possibilité de logement, l’éloignement des deux domiciles, les relations entretenues (conflictuelles, appréhension des enfants…) ou les troubles pouvant affecter le parent souhaitant en être bénéficiaire (alcoolisme, troubles psychologiques …)
Les modalités sont fixées par le JAF sauf meilleur accord entre les parents.
Quelles sont généralement ces modalités ?
De façon classique, il est fixé les 1ere, 3eme et 5eme fins de semaine de chaque mois, soit un peu plus qu’un week-end sur deux.
Généralement, le droit de visite et d’hébergement est décidé uniquement pour la moitié des petites et grandes vacances scolaires ; l’enfant pourra être hébergé par l’autre parent, en alternance les années paires et les années impaires.
De plus en plus souvent, il est décidé d’élargir le droit de visite et d’hébergement à une journée supplémentaire dans la semaine, généralement choisie du mardi soir ou mercredi soir, afin de permettre à l’enfant d’être continuellement en contact avec le parent bénéficiaire de ce droit.
Il s’agit de modalités généralement admises mais rien n’empêche de les fixer autrement, dès lors qu’elles sont conformes à l’intérêt de l’enfant.
Ainsi il peut être décidé :
- Que les vacances seront divisées en 4 parties d’une durée égale,
- un forfait réparti dans le mois, lorsqu’un parent a un emploi du temps variable ; cette modalité ne pouvant, bien évidemment, intervenir que lorsque les parents agissent en totale entente,
- que ce droit n’interviendra pas les fins de semaine mais aura une durée plus longue durant les vacances ; et ce, lorsque les parents sont éloignés sur un plan géographique.
L’intérêt de l’enfant devant guider le choix des parents ainsi que celui du JAF, il peut être décidé un simple droit de visite (sans hébergement) dans un lieu restant à déterminer.
Il pourra également être décidé que ce droit limité n’interviendra qu’en présence d’un tiers qui pourra être un parent (les grands-parents) ou toute autre personne de confiance ; l’accords de cette dernière étant alors nécessaire.
Généralement, il sera décidé d’un simple droit de visite (sans hébergement) dès lors qu’il n’y aura pas de possibilité de loger l’enfant ou, sur un plan pratique, lorsqu’il s’agira d’un nourrisson.
L’article 373-2-1 et l’article 373-2-9 du code civil précisé par l’article 1180-5 du code de procédure civile (CPC) prévoient également que le droit de visite peut s’exercer « dans un espace de rencontre »
Généralement ce lieu neutre a pour objet de garantir l’intérêt de l’enfant, et plus précisément, sa sécurité physique et mentale.
Ce lieu sera imposé dès lors que les relations ont été interrompues avec l’enfant durant plusieurs mois ou plusieurs années ou, dans le cas où la rencontre peut revêtir un caractère dangereux pour l’autre parent.
Dans ce cas, il s’agit d’une mesure tout à fait exceptionnelle qui oblige le JAF à motiver son jugement sur ce point (article 373-2-9) ; étant précisé qu’il peut modifier où rapporter sa décision, d’office, à la demande des parents et même à la demande du Parquet (Article 1180-5 du code de procédure civile).
En cas de difficulté, la personne gestionnaire de « l’espace de rencontre » en réfère au juge.
Quel parent aura l’obligation d’aller chercher les enfants et de les ramener ?
Ce déplacement a un coût, et le JAF déterminera cette obligation en prenant en considération les moyens matériels des parents ; en tout état de cause, les modalités du déplacement ou la répartition de son coût devront être fixées par le juge sauf meilleur accord entre les parents.
Qui décide du droit de visite et d’hébergement ?
Lorsque les parents se séparent (divorce, par exemple), ce sont généralement eux qui décident de la résidence de l’enfant et, dès lors qu’elle est fixée habituellement chez l’un d’eux, ils décident aussi du droit de visite et d’hébergement de l’autre parent.
Certains la fixent amiablement sans même faire homologuer leur décision en justice ; ce qui sera, pour eux, pour le moins préjudiciable, dès lors qu’un conflit interviendra entre les parents.
Quel juge aux affaires familiales est territorialement compétent ?
Si les parents vivent encore ensemble, il s’agira du JAF du lieu de la résidence de la famille (article 1070 du CPC).
Si les parents vivent séparément, le JAF compétent sera celui du lieu de résidence du parent avec lequel réside habituellement les enfants mineurs en cas d’exercice conjoint de l’autorité parentale.
Il s’agira du juge du lieu de résidence du parent qui exerce seul l’autorité parentale, dans le cas contraire.
Dans les autres cas, le JAF territorialement compétent sera celui du lieu où réside le parent qui n’a pas pris l’initiative de la procédure.
Si les parents décident de saisir la justice conjointement, ils pourront saisir, au choix, le juge compétent du lieu où réside l’une ou l’autre des parties.
Attention : La compétence territoriale est déterminée par la résidence au jour de la demande.
Qu’appelle-t-on la « résidence » ? Il s’agit du lieu où l’intéressé a fixé, avec la volonté de lui conférer un caractère stable, le centre permanent ou habituel de ses intérêts.
Une limite toutefois : En cas de modification de résidence, la nouvelle résidence des enfants ne peut fonder, à elle seule, la compétence territoriale du JAF.
Il faut, pour ce faire, que le déménagement soit intervenu sans fraude.
C’est-à-dire que le déménagement doit être intervenu après que l’autre parent en a été informé en temps utile ; et ce, afin de lui permettre de rechercher un accord avec l’autre parent.
La jurisprudence est constante et la Cour d’appel de Versailles l’a rappelé concrètement. (Cour d’appel de Versailles 15 décembre 2010)
A noter également que d’autres juridictions peuvent être concernées :
- Le juge des tutelles est compétent pour la gestion des biens des mineurs,
- le juge des enfants est compétent pour déterminer les mesures d’assistance éducative,
- le tribunal correctionnel est compétent pour prononcer la déchéance de l’autorité parentale et sanctionner les cas d’abandon de famille, de délaissement de mineurs, ou de maltraitance…
Les articles 1072-1 et suivants du CPC et l’article 1187-1 fixent les règles de coordination entre ces juridictions et permettent même au juge aux affaires familiales et au juge des enfants de se transmettre une copie des pièces de leur dossier.

La Cour de cassation est venue récemment préciser les pouvoirs respectifs du juge des enfants et du JAF. (Cour de Cassation 1er Ch-20 octobre 2021 : Lorsqu’un juge aux affaires familiales s’est prononcé sur la résidence de l’enfant et le droit de visite d’hébergement de l’autre parent, le juge des enfants, s’il est saisi postérieurement, ne peut modifier ce droit tel qu’il a été fixé par son collègue)
Il ne peut le faire que s’il existe un jugement de placement tel que prévu par l’article 375-3 du code civil, et si un fait nouveau est de nature à entraîner un danger pour le mineur.
Comment saisir le JAF ?
Le juge peut être saisi par l’un ou l’autre des parents ou par les 2 conjointement.
Il peut également être saisi à la demande du ministère public qui agira à la demande d’un tiers qui peut être un parent.
Dans la forme il s’agira d’une requête unilatérale ou conjointe.
Mais le JAF peut également être saisi par assignation rédigée par un avocat.
En cas d’urgence, le juge peut être saisi par requête pour autoriser le demandeur à assigner à bref délai. (Article 1 137 alinéa 2 du CPC)
Quels sont les pouvoirs du JAF ?
Si les parents sont d’accord, le juge entérinera ledit accord à la condition, bien évidemment, que l’intérêt de l’enfant ait été respecté.
Concrètement, ils rédigeront une convention (en sa faisant aider par un avocat, s’il le faut) dans laquelle ils ne manqueront pas de préciser que le mineur capable de discernement a été avisé de son droit à être entendu et à être assisté d’un avocat, et le cas échéant, qu’il n’a pas souhaité faire usage de ce droit. (Article 338-1 du CPC)
S’ils saisissent le JAF par requête conjointe, ils ne sont pas alors tenus de comparaître en personne. (Article 1143 du CPC)
Le juge statue sans débat, sauf à vouloir entendre les parties.
Il ne pourra modifier les termes de la Convention.
En cas de refus de sa part de l’entériner, les parties pourront faire appel.
Si les parents ne sont pas d’accord, le JAF s’efforcera de les concilier, et à cette fin, pourra même leur proposer une médiation.
Le JAF se prononce toujours en appréciant l’intérêt de l’enfant.
L’article 373-2-11 du code civil rappelle sa large marge de manœuvre, puisqu’il prend notamment en compte :
- La pratique que les parents on précédemment suivie ou les accords qu’ils ont pu conclure antérieurement.
- Les sentiments exprimés par l’enfant mineur,
- L’aptitude à assumer ses devoirs et respecter les droits de l’autre,
- Les résultats des expertises et des enquêtes sociales,
- Les pressions ou violences à caractère physique ou psychologique exercées,
- Le comportement pouvant traduire un refus de respecter le droit des enfants à entretenir des relations régulières avec l’autre parent,
- Un déménagement organisé dans des conditions déloyales portant atteinte à l’intérêt de l’enfant de maintenir des relations suivies avec son père ou sa mère.
Le JAF peut décider, même d’office, d’une mesure d’enquête notamment une enquête sociale, s’il estime ne pas être suffisamment informé. (Article 1072 du CPC)
Qui peut bénéficier du droit de visite et d’hébergement
Les parents peuvent le solliciter, mais ils ne sont pas les seuls intéressés.
Les grands-parents et arrière-grands-parents doivent pouvoir entretenir des relations personnelles avec l’enfant. (Article 371-4 alinéa premier du code civil)
En cas d’atteinte, les grands-parents peuvent demander non seulement un droit de correspondance mais aussi un droit de visite et d’hébergement.
L’enfant lui-même représenté par un mandataire ad-hoc peut saisir le JAF à cette fin.
Le juge se prononcera après avoir apprécié l’intérêt de l’enfant ; étant précisé qu’un conflit entre les parents et les grands-parents ne saurait justifier l’absence de relation personnel de l’enfant avec ses ascendants.
Un tiers peut également demander à bénéficier de ces droits. Il peut avoir un lien de parenté ou non avec l’enfant.
L’article 371-4 du code civil vise ainsi « celui qui a résidé de manière stable avec l’enfant et l’un de ses parents, a pourvu à son éducation, à son entretien ou à son installation, et à nouer avec lui des liens affectifs durables ».
Encore une fois, le JAF statue au regard du seul intérêt de l’enfant et celui qu’on appelle le parent social n’est pas traité différemment des autres parents.
Rappelons également, qu’à titre exceptionnel, il peut être confié à un tiers (article 373-3 alinéa). Il s’agit de l’hypothèse où l’un des parents est privé de l’exercice de l’autorité parentale.
La modification du droit de visite et d’hébergement

Comme toutes mesures relatives aux enfants, les décisions relatives à ce droit ne sont jamais définitives. (Article 373-2-13 du Code civil)
Le principe est le suivant :
Elles peuvent faire l’objet de modifications à la demande de l’un ou l’autre des parents (ou du ministère public) dès lors que survient un élément nouveau qui le justifie.
Il peut s’agir notamment :
– Du déménagement de l’un des parents,
– de l’existence d’un conflit important mettant en cause les parents, l’enfant, et même le nouveau compagnon ou la nouvelle compagne du parent,
– des conclusions de l’enquête sociale.
Les atteintes au droit de visite et d’hébergement
Le défaut d’exercice
Chacun des parents a le droit et le devoir d’assumer sa fonction parentale (Article 371-1, article 373-2, article 373-2-1 et 373-2-11 du code civil)
Dans la pratique il apparaît que certains parents considèrent que le droit de visite et d’hébergement est uniquement un droit puisqu’aucune sanction n’a été prévue par le code civil à l’encontre du parent qui refuserait de voir ou de recevoir ses enfants.
Il convient toutefois de rappeler que le défaut d’exercice du droit de visite et d’hébergement a été sanctionné, plusieurs fois, de façon singulière, afin de remédier à cette difficulté.
Ainsi :
- Le parent défaillant dans l’exercice de son droit a été condamné à payer des dommages et intérêts en l’état de sa faute sur le fondement de l’article 1382, et à présent 1240, du code civil,
- le parent défaillant a été condamné à l’augmentation de la pension alimentaire au motif qu’il n’assumait plus les besoins des enfants pendant les week-ends et les vacances,
Il a même été décidé de la suppression de ce droit, et même de l’exercice conjoint de l’autorité parentale, en cas de désintérêt total du parent.
La non-représentation d’enfant

Le fait pour un parent de ne pas laisser l’autre exercer son droit de visite et d’hébergement est constitutif du délit de non-représentation d’enfant ; délit prévu et réprimé par l’article 227-5 du Code pénal.
Ce délit concerne aussi bien le parent qui ne remet pas l’enfant que celui qui ne le restitue pas.
Le danger de l’enfant est parfois invoqué pour justifier le défaut de remise ou le défaut de restitution ; toutefois, la preuve doit en être rapportée.
La résistance de l’enfant ne constitue pas un fait justificatif ni une excuse légale quand bien même il a parfois été admis lors de circonstances exceptionnelles.
L’état de santé de l’enfant est le plus souvent évoqué, et, parfois, admis.
La suspension et la suppression du droit de visite et d’hébergement
Le droit de visite et d’hébergement peut être supprimé pour des motifs graves en vertu de l’article 373-2-1 du code civil.
Il peut être supprimé quand bien même les parents exercent conjointement l’autorité parentale. (Cour Cass – 1ere civile 9 février 2011)

Les motifs sont divers et variés :
La suppression peut être prononcée pour :
- Dépression et morale et psychologique importante visant à nier la place de l’un des parents,
- l’alcoolisme de l’un des parents,
- la vie dissolue,
- la condamnation du père à des faits de corruption de mineur et de détention d’images pédopornographiques (Cour Cass 1ere civile 17 avril 2019),
- l’enlèvement de l’enfant après avoir faussement déclaré la perte de son passeport (Cour Cass 1ere civile 25 mars 2009),
- la prise de décisions graves sans concertation avec l’autre parent,
- des conditions d’hébergement inadaptées et un désintérêt pour l’enfant et des propos négatifs sur la mère,
- des difficultés relationnelles entre le père et sa fille…
Enfin, il convient de rappeler qu’il peut être suspendu, dans l’intérêt de l’enfant.
La consultation d’un avocat peut être utile pour faire faire valoir vos droits dans le cadre de la fixation d’un droit de visite et d’hébergement et, ce, dans l’intérêt de l’enfant.
Il peut également être utile de consulter un avocat pour ne pas voir votre droit modifié ou pour le faire modifier.
Le cabinet de Maître Emmanuel PARDO est à votre disposition dans le cadre de toutes procédures judiciaires destinées à faire respecter vos droits.
AVERTISSEMENT : Cet article a pour unique objet d’intéresser l’internaute sur une question juridique. Il n’a aucun caractère exhaustif et sa lecture ne saurait se substituer à l’indispensable consultation d’un professionnel du droit, tel qu’un avocat, à même d’appréhender les spécificités d’une situation factuelle.